SAMEDI

Samedi c'est jour de fête. Les horaires de visite sont de 14H à 19H. Chaque jour Milo se plaignait de la solitude qu'il ressentait. Je proposais à chaque fois de venir avec un ami. La réponse était toujours "non je ne veux pas qu'ils me voient comme ça". Sauf que la veille il me dit qu'il a envie de voir Manu. J'appelle illico sa mère, adorable. Elle n'en renvenait pas de cette terrible nouvelle. LA voix tremblante elle me dit : "vous savez on aime tellement Milo, la soeur de MAnu, son mec, tout le monde l'adore, je suis tellement émue!". (je chiale).
Je travaille de 10H à 13H sans pause pour optimiser mon temps. Louis XIV est revenu. Il aime Milo et tient à m'aider, je me laisse faire. La veille il est passé le voir avec plein de films sur une carte SD, et de quoi nourrir un régiment. Nous partons ensemble en scooter au Cocon, le pneu arrière éclate. Me manquait que ça. Etrangement je le prends cool, je ne suis plus à ça près. Mais quand même merde, quelle scoumoune! IL court 2KM chercher sa voiture, au fond il est content parce qu'il m'aide et moi je me demande intérieurement comment j'aurais fait sans lui (chier).

A 14h nous arrivons à l'hôpital. Milo saute dans les bras de son ami. Ca fait du bien de le voir joyeux. Je propose d 'aller dans le parc.

-"vazzi je préviens les infirmiers

- ok

De loin je l'entends dire aux infirmiers:

- " je sors avec ma mère et mon beau père ok?

J'ai failli m'étouffer avec ma salive. "Beau père".....nan mais t'es pas sérieux????? JE fais comme si je n'avais rien entendu. Allons donc au parc.
Les garçons jouent à la bagarre pendant 3H comme 2 petits chats. Je retrouve mon Milo, espiègle, joyeux, drôle plein de vie. Pendant ce temps nous discutons tranqullement avec Louis et la mère de MAnu, lui-même dyspraxique, plein d 'insouciance, avec un beau 6 de moyenne générale. Nous nous comprenons, le courant passe. C'est une de mère courage fauchée qui doit se battre et prendre tout en charge toutes seule.

Vers 17H, Milo a un coup de mou. Louis ramène Manu et je reste seule avec lui. Nous nous calons tranquilles dans sa chambre, il est épuisé. ça ne va pas fort. Nous discutons tranquillement. Le sujet de son père est tabou. Je ne peux toujours pas pronnoncer le mot "papa", ça le met dans tous ses états.

-"est ce que tu veux voir ta soeur un soir entre 17H et 19H?

(je devine son menton qui tremble légèrement)

-"non je ne veux pas qu'elle me voit comme ça

- tu as peur de craquer?

- oui c'est ça

Je réfléchis (ça ne m'arrive pas beaucoup en ce moment)

- Et si tu la voyais le matin ce serait mieux?

- oui  c'est sûr

- Ok je t'organise ça.

Louis revient, il comprend tout de suite que Milo n'est pas au top. Il a des codes canalPlus, connecte l'ordi de Milo sur son partable, et l'installe devant le match de foot de l'OM qui a commencé à 17H. Je me cale à côté de lui sur son lit, il se colle à moi. Il insulte l'arbitre, traite Valère Germain de chèvre, les vazziiiiii et les bouuuuuuuu fusent. Malgré tout je vois qu'il n'est pas bien. Je critique le physique des joueurs ( ptain il est court sur pattes celui là, ou Joe la moustache il ne pourrait pas s'acheter un razoir etc) il rigole.

Le moment de se quitter approche. Je ne m'y ferais jamais, lui non plus. Nous discutons avec 2 infirmiers très sympas. Les soirs sont toujours compliqués, malgré le changement de traitement. Ils décident d'avancer l'heure de prise du Tercian à 19H. Milo passe souvent les voir le soir, plein d 'angoisse. Il a besoin d'être accompagné, rassuré.

Milo a une autorisation de sortie dimanche et lundi toute la journée.

Il négocie l'heure avec moi comme un malade, il a des ressources pépère!

- vazzi tu viens à 9H

-sérieux Milo tu dors à 9H et moi aussi d'ailleurs! 10H c'est parfait

- ok mais pas plus tard!

On se sert dans les bras et on se dit au revoir, les larmes aux yeux. Je monte dans la voiture, je chiale. C'est devenu un rituel en fait :)